6 janvier -  Évangile de La Théophanie ou Baptême du Christ (à la Liturgie)

Évangile selon Saint Matthieu (3, 13-17) (texte du Spoutnik)

 

En ce temps-là, Jésus vint de Galilée au Jourdain auprès de Jean pour se faire baptiser par lui. Jean s'y refusait en disant : « C'est moi qui ai besoin d'être baptisé par toi, et tu viens à moi ! » Mais Jésus lui répondit : « Laisse faire pour le moment ; car c'est ainsi qu'il nous convient d'accomplir toute justice ! »

 

Alors il y consentit. À l'instant même où Jésus, baptisé, sortait de l'eau, voici que les cieux lui furent ouverts, et il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et voici que du ciel se fit entendre une voix : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en lui j'ai mis toute mon affection ».

La Théophanie ou Baptême du Christ (12 janvier 2020) - Église St Denis à La Norville

La Théophanie ou Baptême du Christ (13 janvier 2019) - Église Ste Odile à Antony

La Théophanie ou Baptême du Christ (14 janvier 2018) - Église Ste Odile à Antony

La Théophanie ou Baptême du Christ (8 janvier 2017) - Église Ste Odile à Antony

La Théophanie ou Baptême du Christ (10 janvier 2016) - Église Ste Odile à Antony

La Théophanie ou Baptême du Christ (janvier 2015) - Église Ste Odile à Antony

 Homélie du Père Maxime

 

La fête de ce jour est appelée, en Orient, « Théophanie », c’est-à-dire : Manifestation divine. On peut aussi l'appeler « Épiphanie ». Mais, en Occident, quand on parle de l'Épiphanie, il s’agit de la manifestation du Christ aux Mages, c’est-à-dire la manifestation du Christ débordant les frontières du peuple d’Israël et tournée vers les Nations qui, un jour, afflueront vers Jérusalem pour voir la gloire de Dieu.

 

« Théophanie » est aussi un terme plus spécifiquement utilisé pour désigner la mémoire liturgique de l’événement du baptême du Christ au Jourdain, événement traditionnellement perçu comme le lieu providentiel d’une ouverture inouïe de la conscience religieuse de l’homme sur le Mystère de Dieu. La tradition byzantine, en effet, se plaît à voir, dans ce mystère du Baptême du Christ au Jourdain, les premières lueurs de la Manifestation trinitaire du Mystère divin : Père, Fils et Saint-Esprit. Et c’est-ainsi que l’on parle du baptême de Jésus en terme de « Théophanie » pour évoquer la manifestation de la communication mystérieuse des trois Personnes divines au moment initiatique où Jésus reçoit le baptême de repentance dans le Jourdain.

Mais tout ceci peut rester des mots, ne pas dépasser le vernis du vocabulaire religieux. Nous pouvons, en effet, être « spectateurs » ou auditeurs d'une doctrine, sans nécessairement nous sentir participants du Mystère dont nous sommes censés avoir reçu quelque lumière. Il nous faut, cependant, prendre conscience qu’il existe un rapport étroit entre la manifestation de Dieu et la manifestation de l'homme. Nous ne saurons jamais rien de Dieu, ou sur Dieu, que nous ne le découvrions à travers l'homme, ici et dans l'éternité ! Car Dieu, selon la foi chrétienne, nous apprenons à le contempler à travers le visage du Christ.

 

Le Christ reçoit au Jourdain, des mains du Baptiste, un baptême qui, d’une certaine manière, est une préfiguration, voire l’amorce de son véritable baptême dans le feu et l’Esprit de la Pâque, à savoir la plongée de tout son être dans les eaux de la mort, ces eaux qui deviendront pour nous les eaux de la régénération.

 

Or, si ce baptême est déjà vécu par Jésus comme un dévoilement de son propre Mystère, à travers un tel événement se profile aussi, par extension, un lien entre ce Mystère et notre propre initiation baptismale. Il existe, en effet, une relation profonde entre l'initiation que Jésus a reçue au Jourdain et celle que nous avons reçue à travers le sacrement de notre baptême. Qu'est-ce qu'une initiation ? Une initiation est une « mise en chemin », l’ouverture d'une voie de connaissance. L’initiation nous révèle dans quel sens il nous faut avancer pour aller à la rencontre de nous-mêmes et du sens ultime de notre vie. Il en va de toute initiation comme de celle d’Abraham, lorsque Dieu l’appelait à se mettre en route vers la terre qu’il lui indiquerait, cette terre qui est aussi la connaissance ultime de lui-même. Si l’initiation est l’ouverture d'une voie, le tracé de cette dernière n’est pas extérieur, mais intérieur à nous. La voie doit s’ouvrir dans notre cœur, dans notre intelligence et dans notre esprit. C'est notre conscience qui, en fait, doit s'ouvrir, cette conscience ici symbolisée par l’élément de l’eau.

 

Nous trouvons, dans le récit de création, au livre de la Genèse, cette image archétypale des « eaux d'en-haut » et des « eaux d'en bas ». Les eaux d'en-haut sont comme le symbole de la conscience ouverte sur l'infinité – ou l’infinitude –, au-delà de la sphère des astres et du soleil, au-delà du firmament ; elles sont la polarité de la conscience divine en l’homme. Mais il y a aussi les eaux d’en bas qui représentent la conscience profonde de l'homme d’ici-bas, la profondeur psychique d’où surgissent en nous les sentiments, les pensées, les émotions positives comme négatives.

 

Lorsque Jésus entre dans les eaux du Jourdain, il entre dans les eaux profondes de la conscience humaine, affrontant tout ce qu’il peut y avoir de peurs, d’angoisses, mais aussi de désirs, de quêtes, d’incertitudes. Porter le péché du monde, c’est aussi descendre jusque dans l’enfer de la conscience humaine, y assumer la peur de la mort et de toute dissolution. Mais, c’est avec une foi éveillée que Jésus visite ces profondeurs de l’âme humaine ; il y entre « en conscience », c’est-à-dire avec la conviction intime que le Dieu juste est avant tout un Dieu de Vie, de Miséricorde et d’Amour. Que se passe-t-il alors dans cette plongée initiatique ? Loin d’être engouffré et dissout dans les eaux d’en bas, ce sont les « eaux d’en-haut » qui, pour Jésus, vont se mettre à sourdre depuis le ciel. Le ciel qui s’ouvre au-dessus de Jésus est celui de sa propre conscience divine. Jésus commence à voir et entendre intérieurement d'où il vient et où il va. Et les eaux d’en-haut vont se répandre comme une pluie d’Esprit divin à la manière d’un vol de colombe. Ce qui se produit au Baptême de Jésus, c’est l'ouverture de sa conscience divine de Christ et la révélation en lui de ce qu’est l’Homme : le « Fils de l’homme », l’Adam, l’image et la ressemblance de Dieu. La manifestation de la gloire divine au cœur et au sein de la création (la « Théophanie ») se révèle être, en réalité, le dévoilement du Mystère divin de l'homme : "Tu es mon Fils, mon bien-aimé, celui en qui je mets toute ma complaisance, toute ma bienveillance".

 

Ce dévoilement n'est pas étranger à l'initiation de notre baptême ; car c'est rigoureusement cela qui nous est offert au baptême, en sorte que la mémoire liturgique du baptême de Jésus devient aussi, pour nous, une stimulation de notre mémoire à nous rappeler « qui » nous sommes. Nous sommes fils bien-aimés dans le Fils, dans le « Bien-aimé ». En vérité, il n’y a pas cinquante, cent ou des milliards de bien-aimés ; il n’y en a qu’un seul ; mais nous le sommes, ce Bien-Aimé, parce que Jésus est le Bien-Aimé et qu’Il nous a pris en Lui, dans le don de sa vie, dans son entrée consciente dans les arcanes de notre humanité. Nous ne formons avec Lui – et jamais sans lui – qu’un seul Fils, un seul Corps, un seul Christ, un seul Homme.

 

Aussi, pour nous, l’accès à une telle conscience représente une immense responsabilité. Notre regard sur la réalité est, hélas, trop souvent un regard de division ou de séparation. Nous voyons, certes, des « individus », mais nous ne parvenons pas à voir l'Homme : l’Homme total, le Christ en qui tout être a reçu les richesses de la bienveillance et de la complaisance divines. Nous voyons des hommes, des individus ; et, de là, nous sérions entre les bons et les mauvais, entre les victimes et les agresseurs, les justes et les injustes, les sains d’esprit et les fous. Or, tout ceci, c'est l'homme : l’homme assumé, totalement et en conscience, dans l'être même du Christ. Comment donc pouvons-nous, dès lors, séparer ce que Dieu a uni ? Mais n’est-ce pas, précisément, ce que, à travers nos jugements quotidiens, nous faisons ?

 

Une telle question, en regard de la manifestation baptismale de l’unité du Fils de l’homme, nous confronte, par contraste, au feu meurtrier d’une actualité où l'homme vit la folle séparation entre les individus, par l’orgueil du jugement et la condamnation. Si nous voulons faire cesser la violence, c’est à ce regard de division qu’il nous faut renoncer. Nous n'arrêterons jamais la violence si nous n’accédons pas aux sources de la miséricorde, si nous ne découvrons pas en nous, au-delà de la fureur de toutes nos insurrections, de toutes nos révoltes – au-delà de notre sens viscéral de la justice – une réalité encore plus forte que nos émotions les plus justifiées, à savoir la vision de l’humanité « une ». Il nous importe de comprendre que, en raison de notre propre initiation baptismale, nous ne pouvons pas entrer dans la gloire, les uns sans les autres. Nous ne pouvons pas être sauvés de l’illusion du péché et de la mort, les uns sans les autres. C’est là ce qui doit habiter le cœur de l’être initié que l’on appelle un « baptisé ».

Même justes, nous ne sommes pas étrangers au mal qui se commet sur la terre. Et ce n’est pas en rejetant les êtres qui font du mal que nous construisons le corps du Christ. Il nous faut aussi les confier aux eaux du Jourdain, les remettre dans la mort de Jésus, les plonger dans le feu de sa Croix : les placer dans le lieu de la régénération universelle de toute notre humanité.

 

Si, à l’instar du Maître, nous pouvions descendre très profondément dans la conscience humaine, dans les profondeurs de notre propre conscience d’homme, n’y verrions-nous pas aussi des choses que nous abominons : le meurtre, la jalousie, l'adultère ? Mais tout ceci, n'est-ce pas nous ? Or, si nous en restons à l’horreur d’une telle vision, c’est que nous ne sommes pas encore descendus suffisamment profond. Si nous descendions encore plus profond, au-delà de tout cela, ou en deçà de tout cela, nous verrions sourdre, depuis l’extrême profondeur des eaux d’en bas, les eaux lumineuses d’en-haut ; nous verrions surgir, dans la lumière divine, le socle inviolé de la nature humaine, l’image et la ressemblance de Dieu ; car la Lumière qui est au-delà de toute lumière englobe toutes les eaux : et d’en-haut et d’en bas !

 

Maxime Gimenez

BAPTEME DU CHRIST 10 Janvier 2015.doc
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